Barry Horton, ébéniste de Londres à Vernais
C’est à Vernais, entre la forêt de Meillant et la forêt de Tronçais, que cet Anglais imagine et soigne les meubles qui lui sont confiés par des clients du monde entier.
Lire le PORTRAIT DU TERROIR paru dans L’Écho du Berry du 3 juillet 2014 en vente chez les marchands de journaux ou consultable en ligne http://www.echoduberry.fr/ Loin de l’agitation londonienne, Barry invente et restaure à Vernais des meubles de tout bois.l faut s’aventurer sur les petites routes du canton charentonnais jusqu’à Vernais, prendre la direction des Moussins pour arriver à l’atelier d’ébénisterie de Barry Horton. Voilà déjà quatorze ans que cet artisan anglais a élu domicile en Berry, aux côtés de son épouse, Lesly-Anne. Aujourd’hui, il est deux heures mais le thé vert est déjà prêt à être partagé si l’on franchit la porte des Horton. Très vite, on arrive à l’atelier, spacieux et très bien rangé comme un indice de la méticulosité de l’ébéniste, tandis qu’au sol de gracieux copeaux de bois n’ont de cesse que de s’enrouler, attestant du travail quotidien que Barry réalise avec amour pour ses clients français, anglais, américains ou japonais… Restauration des menuiseries de la Welbeck House Son métier, il l’a choisi très jeune puisqu’il a embrassé la voie de l’apprentissage dès l’âge de 15 ans. Comme une interpellation divine, il est frappé par la beauté du bois des sièges d’une église alors qu’il n’a pas encore 7 ans. Et puis, « mon père a été menuisier entre les deux guerres, cela a forcément joué un rôle », sourit Barry en montrant, comme on délivre un trésor, les outils du paternel qui ornent l’une des étagères de l’atelier. Né en 1948 à Romford, dans la banlieue nord-est de Londres, c’est à Brentwood, dans l’Essex, qu’il débute son apprentissage du bois. Au bout de cinq ans, son diplôme en poche, il travaille quelques années avant de rencontrer sa moitié, « dans une discothèque », précise Lesly-Anne, qui lui a donné deux enfants. Barry changera un temps de métier et travaillera dans le pub de son beau-père pour se rapprocher de son épouse qui, elle, a pour l’essentiel travaillé dans la gestion. Mais le couple a la bougeotte et change de vie en s’installant, en Espagne, à Majorque, où il restera trois ans. La naissance des enfants les décide à rentrer au pays, à Rayleigh dans l’Essex, pendant trois ans puis à Hullbridge, où ils se poseront enfin pour seize ans. « En 1979, j’ai recommencé à faire mon vrai métier d’ébéniste », se souvient Barry Horton. Il bâtit son entreprise à Londres et les commandes se multiplient jusqu’à ce qu’il emploie bientôt trente personnes et porte « un costume et une cravate ». Il conduit, entre autres, la restauration de différents édifices patrimoniaux, celle des menuiseries de la Welbeck House du XVIIe siècle pour la fondation English Heritage. Mais la crise financière de 1989 sonnera la fin de l’entreprise de Barry Horton. « Le principal est que les salariés aient pu être payés avant la liquidation même si cela n’a pas été notre cas », se rappelle Lesly-Anne. Alors, le couple songe à repartir. D’abord en Espagne, « mais la situation économique s’y était aussi dégradée ». Alors pourquoi pas la France ? Barry prend une carte de l’hexagone et entoure les coins de campagne tranquilles qui ne soient pas loin de l’autoroute ni d’un aéroport. « Nous avons pris trois mois pour visiter, se souvient Barry. Nous voyagions dans la voiture, avec le chien, jusqu’à ce que l’on trouve cette maison aux Moussins, à Vernais.» Ainsi, en 2000, c’est le début d’une nouvelle vie. Barry peut enfin enlever son costume et retrouver son habit de travail, au contact de la matière. Pile entre la forêt de Meillant et celle de Tronçais, il peut sculpter des meubles en bois de cormier, chêne, orme ou merisier. Mais sa préférence revient au bois de noyer, « être à son contact est un plaisir, sourit l’ébéniste. Il se rabote facilement à la main, son veinage est sublime et il donne de très beaux effets. » Créateur et designer de meubles sur mesure, la restauration de meubles occupe de façon croissante les journées de Barry Horton. Par exemple, une commode Louis XVI sur laquelle il s’est déjà penché durant soixante heures, le temps de redonner vie à son intérieur et d’accomplir un lourd travail de marqueterie. Prix des Métiers d’art Reconnu dans sa profession, on lui a également confié la restauration de l’horloge astronomique abritée au musée du Palais d’Hampton court pour qui il travaillera également à la création d’une dizaine de anses pour chocolatière. Dans le Cher, il décroche en 2005 le prix départemental des Métiers d’Art de la Société d’encouragement aux Métiers d’art (SEMA). « Le jury m’impressionnait beaucoup car je ne savais pas encore bien parler français, raconte Barry. L’un des examinateurs m’a dit que j’étais sûrement le premier étranger à obtenir ce prix dans le département. » Si quand il est arrivé en France, Barry ne savait dire que “bonjour”, “au revoir” et “merci”, le couple a voulu s’intégrer pleinement dans son pays d’accueil, si bien qu’à ce jour, « nous avons plus d’amis Français que d’amis Anglais », explique Lesly-Anne. Très vite, elle fait des randonnées pour rencontrer les gens et parfaire son français en participant à des activités locales. Barry, lui, propose des cours d’entretien et de restauration de meubles via les ateliers de l’Université rurale du canton de Charenton-du-Cher (URCC). Il vient aussi d’être élu conseiller municipal à Vernais où il a décidé de continuer à s’investir. « On nous a tellement donné qu’il est normal de rendre » « On nous a tellement donné, qu’il est normal de rendre en essayant d’apporter un peu et de redynamiser le village », avance le nouvel élu. À l’image du cordonnier chanté par Jean-Jacques Goldman, c’est pour faire naître des meubles ou pour redonner un second souffle à de vieilles branches que Barry Horton réussit à mettre, loin de l’agitation londonienne, tout son « temps », son « talent » et son « coeur ». Dans la maison familiale, les oeuvres de l’ébéniste se déclinent du rocking-chair jusqu’aux chaises qui ornent la grande table, toutes personnalisées. Au grand bonheur des invités qui ne peuvent qu’admirer le savoir-faire de Barry Horton, faisant meuble de tout bois. c Anne-Lise Dupays echoduberry.adu@orange.fr Contact : Tél : 02 48 60 56 40 Les Moussins à Vernais www.barry-horton.com